Aller au contenu

Page:Gobineau - Scaramouche - 1922. djvu.djvu/66

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

rue et enfin, après avoir longtemps regardé en l’air, elle découvrit, à l’enseigne de Sainte-Euphrosine, une auberge qui parut à nos voyageurs la meilleure du village, attendu qu’elle était la seule. D’ailleurs, le peu d’argent qui restait dans la bourse commune était une raison de ne pas se montrer difficile. L’hôte, actif et intelligent, eut relayé la charrette, en un tour de main, et quant aux logements il fut aisé d’y pourvoir. La maison était petite, mais l’imagination était grande. Dans la cuisine fut servi le repas. Une chambrette devint le partage de dame Barbara et de Colombine, et pour les hommes, il fut décidé qu’ils coucheraient dans la grange où le théâtre fut en outre établi. L’odeur du foin est si agréable ! Pantalon et Polichinelle se félicitèrent. Il n’y eut qu’Arlequin qui chercha à réclamer ; mais on lui prouva qu’il avait tort et qu’il n’était pas aussi grand seigneur qu’il voulait en avoir l’air devant la servante. A la fin, il se rendit. Les choses étaient ainsi convenues et, pendant qu’on apprêtait le repas, Colombine vint prendre l’air sur la porte. A peine avait-elle jeté un coup d’œil dans la rue, qu’elle vit accourir un jeune garçon bien tourné qui, de la voix la plus insinuante, lui demanda la faveur d’un entretien particulier. A coup sûr, cette demande n’avait rien d’extraordinaire pour Colombine ; on la lui avait souvent présentée, et j’aime à me persuader qu’en toute innocence elle avait pu y consentir quelquefois ; or, toujours on avait traité la même affaire. La bonne fille, ne s’imaginant donc pas qu’il pût