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Page:Gobineau - Scaramouche - 1922. djvu.djvu/71

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A cette fois, les deux vénérables fonctionnaires ne résistèrent plus ; ils comprirent, par ce que leur dit Matteo, que celui-ci tenait déjà une partie des secrets : à quoi bon lui faire mystère du reste ? En outre, Corybante, dont ils se méfiaient, était retourné au château du vieux gentilhomme, où il avait un appartement ; on se pressa donc autour de la petite table, et l’on raconta au comédien ce qu’il avait tant envie de savoir.

Don Geronimo était le dernier rejeton d’une famille qui, sans être illustre, était néanmoins des plus recommandables dans l’ordre de la noblesse. Ses aïeux n’avaient point été courtisans des papes ni des ducs ; mais, dans quelques républiques comme Pérouse ou Lucques, plusieurs d’entre eux avaient exercé des charges, quelquefois s’étaient enrichis, plus souvent encore avaient été dépouillés, bannis ou pendus ; bref, ils avaient légué à leur dernier rejeton une fortune très honorable et un caractère fort têtu et très entier. Don Geronimo, en se mariant, avait espéré acquérir une nombreuse postérité, mais ses espérances furent déçues ; la signora resta stérile et, au bout de dix années qui ne furent qu’un long ouragan, attendu que les deux époux étaient à peu près de la même humeur, la noble dame décéda, laissant son mari dans la cruelle expectative de rendre à sa mort tous ses fiefs au marquis de Bianconero, son suzerain. Rien ne pouvait lui être plus désagréable car, dans toutes les circonstances de sa vie, don Geronimo avait trouvé le marquis sous ses pas : affaires