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Page:Gobineau - Scaramouche - 1922. djvu.djvu/96

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— Monsieur le marquis, je suis le serviteur de Votre Excellence. J’ose me permettre de rentrer dans mon lit, car la nuit est froide et je suis vêtu fort légèrement. Voici mon flambeau que je vous prie de laisser au bas de l’escalier et d’éteindre.

Le marquis de Bianconero regagna sans accident aucun la porte de la rue et rentra chez lui.

Le lendemain, Scaramouche, proprement vêtu, se présenta au palais et demanda à parler à M. le marquis. On l’introduisit aussitôt dans un vaste salon, splendidement orné. Quelques domestiques vinrent le considérer d’un air respectueux, mais étonné, et l’attente durant déjà depuis quelques minutes, il commençait à se croire victime d’une mystification quand une jolie soubrette vint le prendre et l’introduisit chez la marquise.

Mme de Bianconero était une femme d’un certain âge, qui avait pu être fort belle, mais qui ne l’était plus. Elle était pourtant tirée à quatre épingles et avait un air très avenant. Quand Matteo Cigoli entra, elle courut plutôt qu’elle n’alla à sa rencontre, le considéra quelques instants d’un air passionné et se précipitant enfin dans ses bras :

— Mon fils, mon cher fils, je te retrouve donc enfin ! s’écria-t-elle.

Et elle s’évanouit.

Scaramouche, confondu d’étonnement, se trouvait fort embarrassé et ne savait où la mettre ; qu’on ne lui en veuille pas de cette apparente insensibilité. La voix du sang ne parlait pas encore assez haut dans son cœur, pour lui faire oublier