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Page:Gobineau - Scaramouche - 1922. djvu.djvu/97

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le côté ridicule de la situation. D’ailleurs, et avant de s’attendrir, il voulait qu’on s’expliquât, et la marquise revint à elle fort à propos pour satisfaire ce désir raisonnable.

Elle l’embrassa tendrement à plusieurs reprises et puis, le faisant asseoir auprès d’elle sur un sofa, elle se mit à pleurer et dit :

— Vous êtes, don César, le fruit, l’unique fruit de mes trop malheureuses amours avec l’infortuné don Giulio Torrevermiglia. A peine étiez-vous né qu’on vous fit partir secrètement pour la Romagne, sous la garde d’un serviteur de confiance, attaché depuis trente ans à ma famille et à qui l’on confia pour vous une somme de soixante mille ducats, qui devait servir à l’éducation de vos premières années. Mais voyez à quel point le cœur de l’homme est fragile ! Ce vieux serviteur se laissa probablement tenter par le désir de s’approprier les soixante mille ducats ; ce que je puis vous dire, c’est que, malgré tous mes efforts, je n’ai plus jamais entendu parler de lui.

"Le prince Jérôme Boccatorta, joueur effréné et amoureux de moi comme un tigre, tua don Giulio, la veille du jour où j’allais l’épouser, et je me trouvai plongée dans la plus affreuse douleur et sans espoir d’être jamais consolée, puisque je croyais vous avoir perdu sans retour.

En vain M. de Bianconero me faisait-il une cour assidue, je ne voulais pas entendre parler de mariage. Homme dévoué et aimable ! malgré mes refus, il n’en continua pas moins de me voir tous