Page:Gobineau - Souvenirs de voyage. Cephalonie, Naxie, et Terre-Neuve , 1872.djvu/145

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Quand on a gravi la zone incinérée, on a des pierres plates à franchir, puis des aiguilles pointues à contourner, et on se trouve alors sur un vaste plateau tourmenté, rempli de creux, de fissures, de trous, d’où sortaient jadis les déjections volcaniques. Ici, tout est brûlé, rôti, marqué de plaques rouges ou jaunes, bouleversé de mille manières ; les rochers bousculés, jetés les uns sur les autres, présentent les restes brutaux d’une scène de violence inouïe ; les fragments gros et petits de soufre natif couvrent le sol, et comme pour montrer que tout n’est pas fini et que ce qui a été pourrait bien arriver encore, çà et là, au revers d’une paroi calcinée, sort, menaçante et sombre, une colonne épaisse de fumée, dont les flocons vont se perdre dans le bleu de l’atmosphère.

Mais on avait autre chose à voir que le passé et l’avenir ; les splendeurs du présent s’étalaient vivantes et turbulentes à quelques toises de distance en face même du plateau. En se penchant sur le bord septentrional, on se voyait surplombant au-dessus d’une grande vallée pareille à quelque profondeur d’enfer,