Page:Gobineau - Souvenirs de voyage. Cephalonie, Naxie, et Terre-Neuve , 1872.djvu/149

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un esprit cultivé, aux habitudes élégantes qui se sont résumées en un besoin de simplicité presque barbare, mais jamais vulgaire. En réunissant des souvenirs, je pourrais dresser une liste de ces déserteurs du beau monde ; j’en ai connu un à l’extrémité de la Nouvelle-Écosse, dans les forêts voisines de Sydney ; un autre dans les montagnes de la Mingrélie, non loin de Koutais ; un troisième dans la contrée tout à fait sauvage située au nord-est de la Grèce, vers la frontière turque ; j’en pourrais citer beaucoup dans des pays moins extraordinaires mais tout aussi déserts, et moralement aussi distants de la société britannique. Je conclus en répétant que ce goût pour l’exil et le renoncement est si fortement prononcé chez cette race à personnalité puissante, qu’il atteint même les femmes ; lady Esther Stanhope et Zanthe n’ont pas été seules à préférer soit le désert des Arabes, soit Damas, à l’habitation continuée des salons. Norton était donc en plénitude de ses facultés anglaises, et voyant Akrivie assise dans un grand fauteuil sur le pont, et pour un moment isolée, prit place à côté d’elle et lui dit gravement :