Page:Gobineau - Souvenirs de voyage. Cephalonie, Naxie, et Terre-Neuve , 1872.djvu/166

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’allait pas chez ce malotru incontestable, il lui était difficile d’aller chez personne autre, et alors pas de chasse aux caribous ; il ne lui restait plus qu’à s’en retourner à Paris sans avoir rien fait. Cette judicieuse remarque, née de la droiture de son jugement, fit revenir Charles Cabert à des sentiments plus modérés, et décidé à se contenter d’une vengeance épigrammatique, il se tourna vers le domestique de l’hôtel. Celui-ci l’accompagnait et marchait sur la même ligne que lui. Le jeune homme demanda d’un ton méprisant :

— Qu’est-ce que c’est que ce Harrison ?

— Harrison ? répondit l’Irlandais ; c’est un homme comme vous ne devez pas en avoir beaucoup dans votre sale Europe, je vous en réponds. Il a donné cette année cinq cents livres pour les travaux de la cathédrale, mille pour les écoles ! Il fait peut-être travailler, à l’heure qu’il est, plus de quinze cents personnes, et, avec l’aide de l’évêque, pas un homme ne le vaut dans le gouvernement colonial ! Harrison ? Est-ce que vous ne connaissez pas Harrison dans votre pays ? Alors, qu’est-ce que vous connaissez donc ?