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Page:Godard d’Aucour - Thémidore, 1908.djvu/117

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le comique assemblage. Quoique je ne fusse pas en position de rire, je ne pus m’empêcher de le trouver plaisamment imaginé. La capote dont il était couvert le masquait au mieux : la pluie, qui dura pendant toute la journée, la lui avait fait prendre : le mauvais temps désespéra bien des personnes, mais je puis dire qu’il ne pouvait y en avoir de plus beau et de plus favorable pour notre stratagème.

Laverdure se transporta d’abord au couvent. Après quelques préambules avec une tourière curieuse, selon son état, et qu’il trompa suivant le sien, il fut admis au parloir de la Mère supérieure. Les premiers compliments épuisés, il lui expliqua modestement le sujet de sa visite et lui dit qu’il était la parente très proche d’une jeune fille nommée Rozette, qui, par ordre du roi et pour son bien, avait été conduite dans la maison depuis le matin ; qu’il venait se réjouir de ce que la Providence l’avait adressée dans un port de salut, où les bons exemples ne lui manqueraient pas et pourraient la faire rentrer dans le chemin de la vertu, dont elle ne s’était que trop longtemps écartée ; qu’il était charmé que de bonnes âmes l’eussent obligée à se repentir et l’eussent fait enfermer ; qu’il y avait déjà plusieurs mois qu’il aurait fait cette action de charité, si ses moyens lui en eussent permis l’exécution. Enfin Laverdure joua la parente si pathétiquement que la Supérieure en fut attendrie : il se mit à pleurer ; le don des larmes est un don de comédien, notre drôle l’est au parfait. Les larmes sont un mal qui se gagne ; qu’une femme pleure, une autre pleurera, ainsi que toutes celles qui viendront, et cela à l’infini. La conversation se termina en disant à la Mère Prieure qu’il désirait parler un moment à Rozette ; que, quoique ce fut une