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Page:Godard d’Aucour - Thémidore, 1908.djvu/128

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alors, me nommant par mon nom, Nanette me reprocha qu’autrefois je n’avais pas daigné la regarder, lorsqu’elle était fille de boutique chez Mme Fanfreluche, cour Dauphine. Quoi ! c’est vous, ma charmante, m’écriai-je. Que je vous rendais peu de justice alors, que je répare ma faute, et que je vous embrasse de tout mon cœur. Effectivement, marquis, elle était la compagne d’une petite maitresse que j’ai eu dans ma jeunesse, que j’aimais à l’adoration, et que j’ai quittée ainsi que beaucoup d’autres. Deux mots de mes intrigues passées me donnèrent lieu de passer aux siennes, et me mirent en une espèce de droit d’y faire un supplément à mon gout : je commençai.

En vain me représentait-elle qu’elle était presque dévote depuis trois ans, que j’allais la chiffonner : sa dévotion excitait mon ardeur, et les trois années de sagesse qu’elle m’objectait, me rassurant contre la crainte du danger, me donnaient de nouvelles forces : je n’étais pas embarrassé de rétablir son ajustement. Une vertu qui ne se débat plus que sur un arrangement de plis, est bien prête à être dérangée elle-même. Nanette le fut. Je la pressai, elle soupira, et, après les façons usitées en tel cas, j’ôtais à cette belle commissionnaire toute connaissance excepté celle du plaisir. Dans le feu de nos embrassements, elle me fit soupçonner qu’il n’y avait pas extrêmement longtemps qu’elle avait perdu la charmante habitude de les varier à l’infini. Soupçon ridicule, réflexion impertinente ! comme si on avait besoin d’exercice pour pratiquer parfaitement les choses qui ne sont que de nature ? Mes estampes répandues sur le lit jouèrent leur personnage et joignirent leur petit murmure à un certain bruit occasionné par la pratique de ce qu’elles représentaient