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Page:Godard d’Aucour - Thémidore, 1908.djvu/46

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rt à votre appel, et vous rend aussitôt votre déclaration. Elle folâtre avec le plaisir, mais elle l’éloigné le plus qu’elle peut de sa véritable destination : gout singulier, d’aimer mieux caresser un beau fruit, que d’en exprimer la liqueur !

Trois jours s’étaient passés depuis votre relation de la prise de Menin, lorsque, plein de vous et inquiet de votre santé, cher marquis, je reçus de vos nouvelles. Je fus au Palais-Royal les communiquer à nos amis, et ensuite me promenai dans une allée un peu écartée. Je vis arriver le président de Mondorville. Il était pimpant à son ordinaire ; la tête élevée, l’air content : il s’applaudissait par distraction, et se trouvait charmant par habitude. Il badinait avec une boite d’or d’un nouveau gout, et y prenait quelques légères couches de tabac, dont, avec certaines minauderies, il se barbouillait le visage. Je suis à vous, me dit-il en passant, je cours au Méridien. Il y fut ; je fis en l’attendant quelques tours seul, et considérai avec un plaisir critique un groupe original de nouvellistes, qui politiquaient profondément sur des choses qui ne doivent jamais arriver. Je m’approchai d’un vieux militaire qui parlait fort haut et fort bien, chose assez rare à son espèce : il fit noblement le panégyrique de notre illustre monarque ; et peut-être, pour la première fois de sa vie, il ne trouva point de contradicteur.

Le président revint du Méridien en grondant de ce que sa montre retardait de quelques minutes : il promit que jamais Julien Le Roy ne travaillerait pour lui, et qu’il ferait venir exprès de Londres une douzaine de répétitions. Tel qui ne veut pas que sa pendule se dérange d’une seconde, est perpétuellement en contradiction avec lui-même.