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Page:Godard d’Aucour - Thémidore, 1908.djvu/78

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de n’être point troublé, mais surtout de ne pas lui en vouloir sur son arrivée, qui semblait ne me pas mettre à mon aise. Je n’y étais que trop ; mais c’est qu’on n’y est jamais avec les personnes que l’on ne connait pas. Je me laissai toucher par la douceur de sa voix, je l’envisageai, et mes regards tombèrent sur une des plus jolies brunes de Paris. Le désordre où j’étais présentait de lui-même le sujet de la conversation : elle le saisit et, le tournant en fille d’esprit, à mon avantage, elle me félicita sur ce que sans doute j’avais exécuté avec Rozette. Ses discours sincères et ambigus, gracieux et ironiques, me mirent dans l’embarras de m’expliquer ; mais comme elle continuait de parler, je fus forcé par politesse de lui répondre. On n’est pas hardi quand on a quelque chose sur la conscience. Je n’étais plus dans un état présentable, et mes réponses se sentirent de ma faiblesse. Je m’en aperçus moi-même. Il est des moments critiques où les plus grands guerriers font mauvaise contenance. Insensiblement, notre conversation tomba sur ce qui venait de m’arriver, mes yeux sur les appâts de la nouvelle nymphe, et ses regards sur un endroit qui était alors extrêmement respectueux. De propos en propos, elle m’avoua qu’elle ne reconnaissait point Rozette dans cette conduite, et ne concevait point ses idées de chagriner un galant homme, dont la figure seule était capable de désarmer la plus cruelle, et qui certainement était fait pour remplir le présage de sa bonne mine. Cette fille était bien dressée, elle parlait à l’esprit avec art, et ses charmes se rendaient maitres de mon cœur. Les louanges qu’elle me donnait tombaient sur un article dont tout le monde est charmé de se prévaloir. Détaillant le caractère de sa bonne amie, elle en faisait par forme de conversation