Page:Godwin - Caleb Williams, I (trad. Pichot).djvu/23

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mon protecteur, lorsqu’un jour je m’avisai d’entrer dans un cabinet séparé de la bibliothèque par une galerie étroite qu’éclairait une simple lucarne. Je n’imaginais pas qu’il y eût quelqu’un dans cet endroit, et je n’y allais que pour y placer quelque chose afin d’être sûr de le retrouver. En ouvrant la porte, j’entends au moment même un long gémissement qui était comme l’expression d’une angoisse intolérable. Le bruit de la porte parut alarmer la personne qui était dans la pièce ; je distinguai comme le son du couvercle d’un coffre qu’on baissait avec précipitation et d’une serrure qu’on fermait. Je présumai alors que M. Falkland était là, et je me hâtais de me retirer, lorsqu’une voix, qui me parut singulièrement terrible, s’écria : « Qui est là ? » c’était la voix de M. Falkland. Ce cri me glaça d’effroi : je voulus répondre, mais la parole me manqua, et, dans l’impuissance de parler, je m’avançai machinalement dans la pièce en dedans de la porte. M. Falkland ne faisait que de se lever de dessus le parquet où il avait été assis ou agenouillé ; son maintien portait toutes les marques de l’embarras et de la confusion. Toutefois un effort violent dissipa bientôt ces premiers symptômes, qui firent place à un visage étincelant de fureur. « Misérable, me dit-il, que venez-vous faire ici ? » Je balbutiai quelques mots d’excuse. « Traître ! s’écria M. Falkland en m’interrompant avec une impatience qu’il ne pouvait contenir, vous vous attachez à mes pas comme un espion. Je vous ferai cruellement repentir de votre insolence. Croyez-vous