Page:Godwin - Caleb Williams, I (trad. Pichot).djvu/298

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Je sentis, dans la position où me mettait la lettre de M. Forester, non pas seulement la volonté, mais l’empressement et l’impatience de retourner. Nous nous procurâmes un second cheval, et nous fîmes notre route, mon compagnon et moi, dans le plus parfait silence. Pendant ce temps, mon esprit était sans cesse occupé à chercher l’explication de la lettre de M. Forester. Je connaissais bien toute la rigueur et l’obstination de M. Falkland à poursuivre les desseins qu’il avait le plus à cœur ; mais je savais aussi que tout principe de vertu et de magnanimité était naturel à son caractère.

Quand nous arrivâmes, il était plus de minuit, et nous fûmes obligés de réveiller un des domestiques pour nous ouvrir. Je trouvai que M. Forester, dans l’idée que je pourrais arriver pendant la nuit, avait laissé un billet pour moi, dans lequel il me marquait de me mettre aussitôt au lit, et de prendre soin de n’être pas dans un état de fatigue ou d’épuisement pour l’affaire du lendemain. Je tâchai de me conformer à son avis, mais j’eus un sommeil agité et très-peu propre à réparer mes forces. Mon courage n’en fut pas abattu ; la singularité de ma situation, mes conjectures sur le présent, mes craintes sur l’avenir, ne m’auraient pas même laissé la possibilité de m’abandonner à la langueur et à l’inactivité.

Le lendemain matin, la première personne que je vis fut M. Forester. Il me dit qu’il ne savait pas encore ce que M. Falkland avait à alléguer contre moi, parce qu’il n’avait pas voulu le savoir. Il était venu le jour précédent à la maison de son frère, où