Page:Godwin - Caleb Williams, I (trad. Pichot).djvu/93

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VII


M. Tyrrel consulta, sur le plan qu’il avait à suivre, son confident ordinaire ; celui-ci, qui ne le cédait guère au squire en brutalité et en insolence, ne pouvait pas se figurer qu’une misérable petite fille, sans richesse et sans beauté, dût gêner le moins du monde les caprices d’un homme de l’importance de M. Tyrrel. La première idée qui vint à ce barbare parent fut de jeter à la porte la malheureuse orpheline, et de l’abandonner entièrement ; mais il ne pouvait pas se dissimuler qu’un pareil procédé ferait beaucoup crier contre lui ; et à la fin il s’arrêta à un projet qui, en mettant suffisamment sa propre réputation à couvert, lui donnait encore bien plus l’assurance de punir et de mortifier sa victime.

Il jeta les yeux, pour son dessein, sur un jeune homme de vingt ans, fils d’un certain Grimes qui tenait une petite ferme dans le domaine de son confident. Ce fut ce garçon qu’il résolut de donner pour mari à miss Melville, soupçonnant dans sa malice qu’entraînée par les sentiments de tendresse qu’elle avait malheureusement conçus pour M. Falkland, elle ne recevrait une proposition de mariage qu’avec une extrême répugnance. Il choisit Grimes comme étant, sous tous les rapports, diamétralement l’op-