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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome I.djvu/37

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mon sang ; mes sentiments deviennent toujours plus tendres, cependant mon cœur est allégé sans cesse et mon bonheur toujours s’accroît.

Nulle part je ne puis l’oublier, et pourtant je prends en repos ma nourriture : mon esprit est libre et serein ; et une secrète ivresse change l’amour en adoration, le désir en rêverie.

Attiré par le soleil, jamais le plus léger nuage ne se berce au souffle des délices éthérées comme mon cœur dans la paix et la joie. Libre de crainte, trop grand pour être jaloux, je l’aime, je l’aimerai toujours.

À la lune.

Sœur de la clarté première, image de la tendresse en deuil, un nuage frissonne en vagues argentées autour de ton charmant visage ; la course de ton pied léger éveille, et fait sortir des grottes fermées au jour, les tristes âmes des morts, les oiseaux nocturnes et moi.

Ton regard curieux plane sur une immense étendue. Élève-moi à ton côté ! accorde à la rêverie ce bonheur ! Et que, dans un voluptueux repos, le chevalier, repoussé au loin, observe, à travers les vitraux, les nuits de son amante.

Le délicieux plaisir de la contemplation adoucit les tourments d’une pareille distance, et je rassemble tes rayons et j’aiguise mon regard : toujours plus vive, la lumière entoure ses membres non voilés, et puis là-bas elle m’attire, comme toi-même, un jour, Endymion.

La nuit nuptiale.

Dans la chambre à coucher, loin de la fête, l’amour veille, à tes vœux fidèle, et tremble que la ruse de malins convives ne trouble la paix du lit nuptial. Devant lui brille, d’une mystique et sainte lueur, une flamme aux pâles rayons. Un nuage d’encens remplit la chambre, afin que votre volupté soit entière.

Comme ton cœur bat, quand l’heure sonne, qui chasse tes bruyants convives ! comme tu brûles pour cette bouche ravissante, qui bientôt sera muette et ne refusera rien ! Pour tout accomplir, tu cours avec elle dans le sanctuaire ; le flambeau, dans les mains du garde, le flambeau devient calme et petit comme un lumignon.