Aller au contenu

Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/208

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Jaxthausen.

SICKINGEN, seul.

Tout marche à souhait. Elle a été un peu troublée de ma proposition… et m’a regardé des pieds à la tête. Je gage qu’elle me comparait avec son damoisea[1]. Dieu merci, j’ose me présenter ! Elle a répondu peu de chose et confusément. Tant mieux ! Il faut que cela cuise quelque temps. Chez les jeunes filles qu’un chagrin d’amour a blessées, une proposition de mariage vient bientôt à point. (Entre Gœtz.)

SICKINGEN.

Quelles nouvelles, beau-frère ?

GŒTZ.

Mis au ban de l’Empire.

SICKINGEN.

Quoi !

GŒTZ.

Tenez, lisez cette lettre édifiante ! L’empereur a ordonné contre moi une exécution, qui doit livrer mon corps en pâture aux oiseaux du ciel et aux bêtes des champs.

SICKINGEN.

Il faut d’abord qu’ils mettent la main à l’œuvre. Je me trouve ici très-à-propos.

GŒTZ.

Non, Sickingen, il vous faut partir… Vos grands projets pourraient être anéantis, si vous vous déclariez si mal à propos ennemi de l’Empire. Vous me serez à moi-même bien plus utile, si vous paraissez neutre. L’empereur vous aime, et ce qui peut m’arriver de pire est d’être fait prisonnier ; alors votre entremise me servira, et me tirera d’une détresse dans laquelle votre secours intempestif pourrait nous précipiter tous deux. Qu’arriverait-il en effet ? L’expédition actuelle est dirigée contre moi : s’ils apprennent que tu es auprès de moi, ils enverront plus de troupes, et nous n’y gagnerons rien. L’empereur est à la source, et je serais dès à présent irrévocablement perdu, s’il était aussi aisé d’inspirer le courage, que de convoquer une troupe de gens.

  1. Weissfisch, poisson blanc, jeu de mots sur Weislingen.