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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/26

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Elles ne sont pas aussi vermeilles qu’étaient ces roses que Damon t’a dérobées.

AMINE, les plaçant à son corsage.

Je les garderai bien ; là où tu demeures doit être aussi la demeure de ces fleurs.

ÉRIDON.

Leur sûreté à cette place est-elle… ?

AMINE.

Crois-tu peut-être ?…

ÉRIDON.

Non ! Je ne crois rien, ma belle ; c’est seulement de la crainte que je sens. Parmi les jeux folâtres, quand le plaisir de la danse, le bruit de la fête le distraient, le cœur le plus fidèle oublie ce que la sagesse lui conseille et ce que le devoir lui commande. Tu peux bien penser souvent à moi, même dans le plaisir ; mais tu n’es plus assez sévère pour contenir la liberté que la jeune troupe se croit bientôt permise, quand une jeune fille lui souffre quelque chose par simple badinage ; leur vain orgueil prend très-vite un jeu frivole pour de la tendresse.

AMINE.

Il suffit qu’ils se trompent. Un peuple de soupirants peut bien tourner autour de moi, mais toi seul possèdes mon cœur, et, dis-moi, que veux-tu de plus ? Tu peux bien permettre à ces pauvres gens de me regarder. Ils croient des merveilles….

ÉRIDON.

Non ! il ne faut pas qu’ils croient rien. C’est là ce qui m’afflige. Je sais, il est vrai, que tu m’appartiens ; mais quelqu’un d’eux se croit peut-être favorisé comme moi. Ses yeux rencontrent les tiens, et déjà il rêve tes baisers, et triomphe même de l’avoir enlevée à ton amant.

AMINE.

Eh bien, trouble son triomphe ! Mon bien-aimé, viens avec moi ; fais-leur voir l’avantage que tu….

ÉRIDON.

Je te remercie. Il serait cruel d’accepter le sacrifice. Ma belle, tu rougirais de ton mauvais danseur. Je sais à qui, dans le bal,