Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/283

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son fils Je disais, vous m’entendez…. celui-ci, c’est autre

chose : il est plus majestueux.

JETTER.

Lorsqu’il était ici, il ne se montrait qu’en grande pompe et en appareil royal. Il parle peu, disent les gens.

Soest. <

Ce n’est pas un maître fait pour nous autres Néerlandais. Il faut que nos princes soient joyeux et, francs comme nous, qu’ils vivent et laissent vivre. Nous ne voulons être ni méprisés ni opprimés, tout bons diables que nous sommes.

JETTER.

Le roi serait, je pense, un bon maître, si seulement il avait de meilleurs conseillers.

SOEST.

Non, non, il n’a aucune bienveillance pour nous autres Néerlandais ; son cœur n’est pas incliné vers le peuple ; il ne nous aime pas : comment pourrions - nous l’aimer nous - mêmes ? Pourquoi tout le monde est-il si attaché au Comte d’Egmont ? Pourquoi le porterions-nous tous sur nos bras ? C’est qu’à son air on voit qu’il nous veut du bien ; c’est que l’enjouement, la franchise, la bienveillance, brillent dans ses»yeux’ ; c’est qu’il ne possède rien dont il ne fasse part au nécessiteux, et même à celui qui ne l’est pas. Vive le comte d’Egmont ! Buyck, c’est à vous de porter la première santé : portez la santé de votre maître ! /

BUYCK.

Oh ! de toute mon âme ! Au comte d’Egmont !

RUYSUM.

Au vainqueur de Saint-Quentin !

BUYCK.

Au héros de Gravelines !

TOUS.,.

Qu’il vive !

RUYSUM.

Saint-Quentin fut ma dernière bataille. Je pouvais à peine avancer encore, à peine traîner ma pesante arquebuse. Cependant j’ai brûlé encore la cartouche sur la peau des Français, et gagné même, pour mon congé, une éraflure à la jambe droite.



BUYCK.

Gravelines, mes amis ! C’est là qu’il faisait chaud. A nous seuls la victoire ! Ces chiens de Welches ne mettaient-ils pas toute la Flandre à feu et à sang ? Mais nous les trouvâmes, il me semble ! Leurs vieux et robustes troupiers tinrent longtemps, et nous fîmes si bien notre devoir de pousser, de tirer et de frapper, qu’ils firent la grimace et rompirent leurs lignes. Là, Egmont eut son cheval tué sous lui, et nous combattîmes longtemps, avançant, reculant, homme contre homme, cheval contre cheval, peloton contre peloton, sur la grande plaine de sable au bord de la mer. Tout à coup, comme du ciel, de l’embouchure du fleuve, pan ! pan ! le canon joue sans relâche dans les rangs des Français. C’étaient les Anglais, qui, sous l’amiral Malin, survenaient par hasard de Dunkerque. A vrai dire, ils ne nous aidèrent