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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/325

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ORANGE.

C’est précisément cette connaissance qui nous conseille de ne pas attendre une épreuve dangereuse.

EGMONT.

Aucune épreuve n’est dangereuse quand on a le courage de l’affronter.

ORANGE.

Egmont, tu t’emportes !

EGMONT.

Il faut que je voie par mes yeux.

ORANGE.

Oh ! que ne peux-tu voir cette fois par les miens ! Ami, parce que tes yeux sont ouverts, tu t’imagines que tu vois ! Je pars. Attends l’arrivée d’Albe, et que Dieu te garde ! Peut-être mon refus te sauvera-t-il ; peut-être le dragon croira-t-il ne rien tenir, s’il ne nous dévore pas tous deux à la fois ; peut-être tardera-t-il, pour exécuter plus sûrement son projet, et peutêtre, dans l’intervalle, verras-tu la chose sous son vrai jour. Mais alors, vite, vite, sauve-toi !… Adieu !… Que rien n’échappe à ton attention : combien de soldats il amène, comment il occupe la ville, quel pouvoir conserve la gouvernante, quelle est la contenance de tes amis…. Donne-moi des nouvelles…. Egmont….

EGMONT.

Que veux-tu ?

Orange, le prenant par la main. Laisse-toi persuader ! Viens avec moi !

EGMONT.

Que vois-je ? Orange, des larmes !

ORANGE.

Pleurer un ami perdu sied même à un homme de courage.

EGMONT.

Tu me crois perdu ?

ORANGE.

Oui, je le crois. Songes-y ! Il ne te reste qu’un temps bien court. Adieu !

EGMONT, Seul.

Se peut-il que les idées des autres hommes aient sur nous