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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/481

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STELLA.

Comme tu vins à nous ! Je ne sais si tu observas qu’au premfer instant tu avais enchaîné mon attention ? Moi, du moins, je remarquai bientôt que tes yeux me cherchaient. Ah ! Fernand, mon oncle amena des musiciens ; tu pris ton violon, et, comme tu jouais, mes yeux s’arrêtèrent tranquillement sur toi ; j’observais chaque trait de ton visage, et.... dans une pause inattendue, tu levas les yeux.... sur moi. Ils rencontrèrent les miens. Comme je rougis ! comme je détournai la vue ! Tu le remarquas,Fernand, car, dès ce moment, je sentis bien que tu regardais plus souvent par-dessus la feuille, que tu manquais souvent la mesure ; en sorte que mon oncle se fatiguait à frapper du pied. Chaque faute, Fernand, me traversait le cœur.... C’était la plus douce confusion que j’eusse éprouvée de ma vie. Pour tout l’or du monde, je n’aurais pu te regarder encore en face. Je m’échappai pour respirer.

FERNAND.

Jusqu’à la plus petite circonstance ! (Apart.) Malheureux souvenir !

STELLA.

Moi-même j’admire souvent comme je t’aime ; comme, à chaque instant, près de toi je m’oublie tout entière ; et que néanmoins tout me soit présent encore, aussi vivement que si ce fût aujourd’hui !... Oui, combien de fois me le suis-je aussi raconté, combien de fois, Fernand !... Comme vous me cher chiez, comme, en donnant la main à mon amie, que tu avais connue avant moi, tu parcourais le bosquet ; elle appelait Stella ; et tu appelas aussi : Stella !.Stella !... Je t’avais à peine entendu parler et je reconnus ta voix. Et comme vous me rencontrâtes, et comme tu me pris la main !... Qui était le plus embarrassé, toi ou moi ?... L’un aidait à l’autre.... Et dès ce moment.... Ma bonne Sara sut bien me le dire le soir même.... Tout est accompli.... Et quelle félicité dans tes bras ! Si ma Sara pouvait voir ma joie ! C’était un bon cœur : elle versa bien des larmes sur moi, quand je fus si malade, si malade d’amour. Je l’aurais volontiers emmenée avec moi, quand j’ai tout abandonné pour ta suivre.

FERNAND.

Tout abandonné !