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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/64

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ALCESTE.

Je ne sais pour ton cœur aucun remède…. (Il l’embrasse.)

SOELLER.

Malheureux que je suis ! aucun hasard n’aura-t-il donc pitié de moi ! Le cœur !… cela m’inquiète.

SOPHIE.

Mon ami !

SOELLER.

Non, cela devient fade ; j’ai de l’amitié par-dessus les yeux, et je voudrais, puisqu’ils ne savent que se dire, qu’elle passât son chemin, et qu’elle en finît avec ses baisers !

ALCESTE.

Ma bien-aimée !

SOPHIE.

Mon ami, encore ce dernier baiser, et puis adieu !

ALCESTE.

Tu t’en vas !

SOPHIE.

Je m’en vais… : il le faut.

ALCESTE.

Tu m’aimes et tu t’en vas !

SOPHIE.

Je m’en vais…. parce que je t’aime. Je perdrais un ami, si je restais. C’est dans la nuit qu’on donne plus volontiers cours à ses plaintes, dans un lieu sûr, ou rien ne nous fait trembler. On devient plus familier, à mesure qu’on se plaint avec plus de tranquillité. Mais, pour une femme, c’est trop risquer. Il y a trop de péril dans la familiarité. Dans ces beaux moments, un cœur amolli par la souffrance ne refuse pas ses lèvres aux baisers de l’amitié : un ami est aussi un homme.

SOELLER.

Elle paraît le savoir bien.

SOPHIE.

Adieu, et veuille croire que je suis à toi.

SOELLER.

L’orage passe près de ma tête. (Sophie sort ; Alccste l’accompagne par la porte du milieu, qui reste ouverte. On les voit dans te