Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome III.djvu/115

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d’esclandre, de peur que tout ne se découvre…. Tu n’écoutes pas ? Que t’arrive-t-il ?




LA NIÈCE.

Excusez-moi…. ce projet…. Je suis troublée…. je reste muette…. Songez dans quelle situation nous laisserons ma tante !

LE MARQUIS.

Elle s’en tirera bien ; elle est assez habile. C’est elle qui a mené cette affaire jusqu’ici, et nous ne gâterons rien à son plan. Enfin je ne veux, je ne puis me passer de toi, et, si tu doutas jamais de mon amour, tu vois maintenant quelle en est l’ardeur. Je ne te laisserai pas ici exposée à tant de piéges, à tant de périls ; avant qu’il fut huit jours, tu serais perdue pour moi. La folle passion du chanoine pour la princesse ne le détourne pas d’autres galanteries. Encore quelques jours, et tu serais, sous le voile, sa souveraine et, sans le voile, sa très-obéissante amie. Viens !… Je l’ai ainsi résolu, et je n’y renoncerai pas. (I l l’embrasse.) Tu es devenue ma conquête et tu ne me seras plus ravie. Ma femme ne me fut jamais un obstacle, et, pourvu qu’elle sauve heureusement les pierreries, elle nous pardonnera volontiers…. Qu’as-tu donc ? Tu n’es pas à toi.

LA NIÈCE.

Je suis perdue ! Menez-moi où vous voudrez.

LE MARQUIS.

Sache que tout est arrangé ! Sous un autre prétexte, j’ai fait empaqueter le plus nécessaire par ta femme de chambre. Dans peu de jours nous serons habillés de neuf et mieux que jamais. Il ne faut pas nous charger de vieille friperie, (Le Marquis entraîne la Nièce, qui le suit desespérée, et regarde encore une fois en arrière du côté du cabinet.)

SCÈNE VIII.

Le Chevalier, seul. Il s’élance hors du cabinet.

Qu’ai-je entendu, et dans quel abîme de trahison et de scélératesse ai-je plongé mes regards ! Je ne pus jamais estimer ces gens, avec lesquels il me fallait vivre ; ils me furent souvent