Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome III.djvu/132

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

dans un pays où mes yeux ne pourront plus même l’apercevoir, au passage de sa voiture ; mais son image et l’espérance ne sortiront jamais de mon cœur, aussi longtemps que je vivrai. Dites-lui ces choses. Vous autres, je vous méprise. Vous vous agitiez autour de ma passion, comme des insectes autour d’un arbre florissant ; vous avez pu en dévorer le feuillage, en sorte que je reste, au milieu de l’été, comme un rameau sec ; mais les branches, les racines, ont bravé vos atteintes. Prenez l’essor, volez où vous trouverez encore de la pâture. ( Le Chanoine se retire. )




LE COMMANDANT.

Les autres seront conduits secrètement, sous bonne escorte, dans une forteresse frontière, jusqu’à ce qu’on ait suffisamment examiné si peut-être leurs friponneries ne se sont pas étendues plus loin. S’il se trouve qu’ils ne sont mêlés dans aucune autre affaire, on les bannira sans bruit du pays, et l’on se délivrera ainsi de tous ces fourbes. Ils sont justement quatre, une voiture complète. Qu’ils partent. Qu’on les accompagne jusqu’à la grande porte, où se trouve une voiture, et qu’on les remette aux dragons.

LA NIÈCE.

Si une malheureuse jeune fille ose demander grâce d’une sévère sentence, veuillez m’entendre. Je me soumets à tous les châtiments ; mais séparez-moi de ces gens, qui sont de ma famille, qui se disaient mes amis, et qui m’ont précipitée dans la plus profonde misère. Enfermez-moi, éloignez-moi : mais, par pitié, jetez-moi dans un couvent !

LE CHEVALIER.

Qu’entends-je ?

  • LE COMMANDANT.

Parlez-vous sérieusement ?

LA NIÈCE.

Ah ! si cet homme avait voulu croire que mes sentiments étaient sincères, nous ne serions pas tous où nous en sommes. Chevalier, vous n’avez pas agi noblement. Par mon imprévoyance, par un hasard, vous avez découvert le secret. Si vous aviez été l’homme que je croyais, vous n’en auriez pas fait cet usage. Vous pouviez instruire le chanoine, ressaisir les