Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome III.djvu/279

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ressemble à Pandore, mais elle paraît plus caressante et plus aimable. La beauté de Pandore causait presque de l’effroi.

ÉPIMÉTHÉE.

J’en fais gloire, c’est la fille de Pandore, c’est ma fille. Nous l’appelons Épimélie, la rêveuse.

PROMÉTHÉE.

Pourquoi m’as-tu caché ton bonheur de père ?

ÉPIMÉTHÉE.

Ô mon excellent frère, mon cœur s’était éloigné de toi.

PROMÉTHÉE.

Pour l’amour de celle que je n’accueillis pas avec faveur.

ÉPIMÉTHÉE.

Celle que tu repoussas, je me l’appropriai.

PROMÉTHÉE.

Tu cachas dans ton fort cette beauté dangereuse ?

ÉPIMÉTHÉE.

Cette beauté céleste !… pour éviter avec mon frère une pénible querelle.

PROMÉTHÉE.

L’inconstante ne te resta pas longtemps fidèle ?

ÉPIMÉTHÉE.

Son image m’est restée fidèle : elle est toujours devant mes yeux.

PROMÉTHÉE.

Elle te tourmente dans sa fille une seconde fois.

ÉPIMÉTHÉE.

Pour un tel joyau, les douleurs mêmes ont leurs délices.

PROMÉTHÉE.

Le bras de l’homme lui procure chaque jour des joyaux.

ÉPIMÉTHÉE.

Sans valeur !… s’il ne produit pas en échange le souverain bien.

PROMÉTHÉE.

Le souverain bien ? Tous les biens me semblent égaux.

ÉPIMÉTHÉE.

Nullement. Il en est un qui excelle : je l’ai possédé.

PROMÉTHÉE.

Je devine à peu près dans quel chemin tu t’égares.