la multitude…. Préte-moi maintenant la douce lumière des perles et le puissant éclat des joyaux.
LA GOUVERNANTE.
Et pourtant ce qui satisfait ton cœur et ton esprit, c’est le vrai, le solide mérite, et non l’apparence.
EUGÉNIE.
L’apparence, qu’est-elle, si la réalité manque ? La réalité, que serait-elle, si elle ne paraissait pas ?
LA GOUVERNANTE.
Et n’as-tu pas dans ces murs mêmes passé les jours sereins de la jeunesse ? N’as-tu pas, sur le sein de celle qui t’aime, goûté avec ravissement le charme de la félicité secrète ?
EUGÉNIE.
Il peut suffire au bouton de fermer ses feuilles, aussi longtemps que les frimas de l’hiver l’environnent ; mais, une fois que, sous l’haleine du printemps, se développe la force de la vie, le bouton s’épanouit en fleur à l’air et à la lumière.
LA GOUVERNANTE.
De la modeste fortune découle un bonheur pur.
EUGÉNIE.
Si l’on se propose un but modeste.
LA GOUVERNANTE.
Celui qui jouit se cherche une limite.
EUGÉNIE.
Je ne puis te croire, étant ainsi parée. Oh ! si cette chambre pouvait s’agrandir jusqu’à la mesure de la salle éclatante où trône le roi ! Si sous mes pieds s’étendaient de moelleux tapis, et sur ma tête une tenture d’or en voûte ! Si, dans ce lieu, en cercle devant Sa Majesté, humbles avec orgueil, les grands, animés par un sourire de ce soleil, brillaient avec magnificence ; moi, dans cette fête si belle, parmi toutes ces femmes qu’on remarque, la plus remarquée ! Oh ! laisse-moi l’avant-goût de ce moment délicieux, où je me verrai le but de tous les regards !
LA GOUVERNANTE.
Non-seulement le but de l’admiration, mais bien plus le but de la haine et de l’envie. •
EUGÉNIE.