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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/111

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LA GAGEURE.

Frédérique.

Du jeune couple ? Fort bien : quand tu auras parlé, ce sera mon tour. Mademoiselle me donne bien du souci.

Jean.

Comment donc ?

Frédérique.

Oui, vraiment. Les premiers jours de notre nouvelle vie, on fut calme et tranquille ; elle semblait satisfaite, elle s’occupait, elle triomphait de n’avoir pas besoin d’Edouard et d’être gaie ; elle se croyait bien armée contre les attaques de l’amour ; et je n’aurais jamais pu remarquer quel sentiment elle nourrit pour lui, si elle n’avait adroitement détourné sur toi la conversation.

Jean.

Faut-il tant d’adresse pour cela ? Je trouve au contraire tout naturel qu’on pense à moi, et qu’on parle de moi dans l’occasion.

Frédérique.

Sois tranquille : cette fois, tu t’es trompé dans tes calculs ; cette fois, son but était seulement d’apprendre à la dérobée, si tu étais beaucoup autour de ton maître, et ce qu’il devenait. Si je n’avais pas l’air d’y prendre garde, elle devenait d’abord plus pressante dans ses questions ; si je semblais soupçonner chez elle de l’amour, présumer un désir de revoir son amant, elle se taisait aussitôt, devenait grondeuse et ne disait pas un mot.

Jean.

La jolie distraction !

Frédérique.

Ainsi passèrent les premiers jours. À présent elle ne parle plus du tout ; elle mange et dort tout aussi peu ; elle quitte une occupation pour une autre, et paraît malade, à vous donner de l’inquiétude.

Jean.

Bah ! que sera-ce encore ? Caprices ! purs caprices ! C’est la maladie perpétuelle des femmes. Elles sont toutes ainsi.

Frédérique.

Dis-tu aussi cela pour moi ? J’espère que non.