Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IX.djvu/67

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était pierreuse et désagréable, autant nous trouvions charmantes les treilles, encore»assez vertes, qui la couvraient. Les habitants, pour qui chaque petit coin de terre est précieux, plantent leurs ceps tout contre les murs qui séparent du chemin leurs propriétés ; les ceps parviennent à une grosseur extraordinaire, et sont amenés au-dessus du chemin au moyen de pieux et de lattes, en sorte qu’ils présentent l’apparence d’une treille continue. Le bas de la vallée consistait principalement en herbages ; mais, en avançant versSion, nous trouvâmes aussi quelque agriculture. Aux approches de cette ville, une suite de collines donne au paysage une variété extraordinaire, et l’on souhaite de pouvoir s’arrêter pour en jouir plus longtemps. Mais la laideur des villes et de la population trouble extrêmement les impressions agréables que le paysage éveille. Les horribles goitres m’ont choqué au dernier point. Nous ne pouvons plus rien demander à nos chevaux aujourd’hui, et notre projet est de nous rendre à pied à Sierre. A Sion, l’auberge est détestable, et la ville est laide et noire.

Sierre, 8 novembre 1779, de nuit.

Nous ne sommes partis de Sion qu’à l’approche du soir et nous sommes arrivés ici de nuit par un beau ciel étoilé. Nous avons perdu, j’en suis sûr, quelques beaux points de vue. Nous avions surtout désiré de monter au château de Tourbillon, qui touche à la ville, et d’où la vue doit être extraordinairement belle. Un guide, que nous avons pris, nous a conduits heureusement à travers quelques mauvaises places, où l’eau avait débordé. Nous avons atteint promptement la hauteur, ayant toujours le Rhône à droite au-dessous de nous. Nous avons abrégé le chemin en parlant astronomie, et nous sommes descendus chez de bonnes gens, qui feront de leur mieux pour nous héberger. Quand on revient sur ce qui s’est passé, une journée comme celle-là semble, par la variété des objets, comme une semaine entière. Je commence à être vivement peiné de n’avoir ni le temps ni le talent nécessaires pour esquisser, même par un simple trait, les sites les plus remarquables : cela vaut toujours mieux pour les absents que toutes les descriptions.