Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IX.djvu/89

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plus commode. Les deux pères qui demeurent ici se trouvent absents, mais, à ce que j’apprends, ce sont toujours les mêmes que j’y trouvai il y a quatre ans. Le P. Séraphin, qui occupe ce poste depuis treize années, se trouve à Milan ; l’autre doit revenir d’Airolo aujourd’hui même. Le temps est serein et le froid très-rigoureux. Aussitôt que nous aurons diné, je continuerai ma lettre, car je vois bien que nous ne mettrons guère les pieds dehors.

Après dîner.

Il fait toujours plus froid ; on ne peut s’éloigner du poêle ; la plus grande jouissance est même de s’asseoir dessus, ce qui est très-faisable dans ces contrées, où les poêles sont construits de pierres plates. Disons d’abord comment nous sommes partis de Réalp et venus jusqu’ici.

Hier au soir, avant de nous mettre au lit, nous suivîmes le père dans sa chambre à coucher, où tout se trouvait rassemblé., dans un très-petit espace. Son lit, qui se composait d’un sac de paille et d’une couverture de laine, ne nous sembla pas avoir rien de méritoire, accoutumés comme nous l’étions àune couche toute pareille. 11 nous montrait tout avec un grand plaisir et une satisfaction secrète, son armoire à livres et d’autres choses encore. Nous fîmes l’éloge de tout, et nous nous séparâmes fort contents les uns des autres, pour aller dormir. Dans l’arrangement de la chambre, pour dresser deux lits contre une paroi, on les avait faits tous deux plus courts que de raison. Cette incommodité m’empêcha de dormir, jusqu’à ce que j’eusse porté remède à la chose en rapprochant des chaises. Ce matin, quand nous nous sommes réveillés, il était déjà grand jour. Nous sommes descendus, et nous avons trouvé des visages tout à fait gracieux et contents. Nos guides, sur le point de refaire l’agréable chemin de la veille, semblaient juger notre course mémorable ; c’était une histoire dont ils se-feraient honneur dans la suite auprès d’autres étrangers ; et, comme ils furent bien payés, la chose leur parut prendre toutes les proportions d’une aventure. Nous fîmes un bon déjeuner et nous partîmes. Notre cliemin longeait la vallée d’Urseren, qui est remarquable en ce que, à une si grande élévation, elle a de beaux pâturages et de beau bétail. On fait ici des fromages que je trouve d’une