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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome V.djvu/119

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péchés et de toutes peines ; je vous pardonne, au nom du Seigneur, tout le mal que vous avez fait. »

Quand Reineke eut accompli de bon gré la pénitence, Grimbert lui dit :

« Mon oncle, faites paraître votre amendement par vos bonnes œuvres : récitez les psaumes ; visitez assidûment les églises, et jeûnez dans les jours prescrits. Indiquez sa route à qui vous la demande ; donnez aux pauvres volontiers, et jurez-moi de renoncer à la mauvaise vie, à tout vol et larcin, à la perfidie et à la criminelle séduction. Par cette conduite, il est certain que vous obtiendrez grâce. »

Reineke répondit :

« C’est ainsi que je veux me conduire : je le jure. »

La confession était accomplie, et ils poursuivirent leur chemin, pour se rendre à la cour du roi. Le pieux Grimbert et son compagnon traversaient de grasses et fertiles campagnes. Ils voyaient, à la "droite du chemin, un monastère. Là des religieuses servaient le Seigneur soir et matin, et nourrissaient dans la cour beaucoup de poules et de coqs, avec maints beaux chapons, qui, après la pâture, se répandaient quelquefois hors des murs. Reineke avait coutume de les visiter souvent. 11 dit à Grimbert :

« Notre plus court chemin passe le long de ce mur. »

C’est qu’il songeait aux poules, qui se promenaient en plein air. Il mena son confesseur de ce côté. Ils approchèrent des poules. Le fripon roulait les yeux de convoitise. Il trouvait surtout à son gré un coq jeune et gras, qui se promenait derrière les autres ; il ne le quittait pas des yeux ; il fondit par derrière sur lui : les plumes volèrent.

Mais Grimbert, courroucé, lui reprocha cette honteuse rechute.

« Pouvez-vous agir de la sorte, malheureux oncle, et voulezvous déjà, pour un coq, retomber en faute, après vous être confessé ? Voilà un beau repentir ! »

Reineke répondit :

« Je l’ai fait par boutade, ô très-cher oncle ; priez Dieu qu’il veuille, dans sa grâce, me pardonner ce péché. Je n’y reviendrai plus ; j’y renonce de bon cœur. »