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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome V.djvu/153

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écoutez-moi. Quand Reineke serait ici à cette heure, et quand il se disculperait de la double plainte que portent ces deux personnes, il me serait toujours facile de montrer qu’il a mérité de perdre la vie. Néanmoins je passe tout sous silence, jusqu’à ce qu’il soit dans nos mains. Et avez-vous oublié comme il a trompé le roi avec le trésor, disant qu’il devait le trouver à Husterlo, près de Krekelborn, et autres grossiers mensonges ? Il a trompé tout le monde, et il nous a outragés, Brun et moi, mais j’y mettrai ma vie. Voilà comme le menteur se comporte sur la bruyère : il rôde, il pille, il tue. Si le roi et les seigneurs le trouvent bon, eh bien, que l’on procède ainsi. Cependant, s’il avait voulu tout de bon se rendre à la cour, il se serait présenté dès longtemps. Les messagers du roi ont couru le pays pour convier les hôtes, et il est resté chez lui. »

Là-dessus le roi prononça ces paroles :

c Pourquoi l’attendre longtemps ici ? Préparez-vous (telle est ma volonté), préparez-vous tous à me suivre dans six jours ; car, en vérité, je veux voir la fin de ces débats. Qu’en dites-vous, seigneurs ? Ne serait-il pas capable enfin de ruiner un pays ? Préparez-vous aussi bien que vous pourrez, et venez sous le harnois ; venez avec des arcs, des piques et toute sorte d’armes, et comportez-vous vaillamment ; et tous ceux que j’armerai chevaliers en campagne, qu’ils en portent le titre avec honneur. Nous assiégerons Maupertuis, le château. Nous verrons ce que Reineke renferme dans sa maison. »

A ces mots, tous s’écrièrent :

« Nous obéirons ! »

Le roi et ses guerriers songeaient donc à prendre d’assaut le château de Maupertuis, à punir le renard ; mais Grimbert, qui avait assisté au conseil, s’éloigna secrètement et courut chez Reineke pour lui annoncer la nouvelle. Il cheminait, le cœur affligé, faisant des plaintes à part lui, et disant :

«Hélas ! que deviendra mon oncle maintenant ? C’est avec raison que toute la famille te pleure, ô toi, le chef de toute la famille ! Quand tu plaidais notre cause devant la justice, nous étions tranquilles : personne ne pouvait tenir devant toi et ton adresse. »

En parlant ainsi, il atteignit le château, et il trouva Reineke