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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome V.djvu/180

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« n’est-il pas ton père ? Tes frères, Hector et les autres, ne sont* ils pas riches et puissants dans le pays ? Troie n’est-elle pas « défendue par son armée, et n’avez-vous pas subjugué le pays « d’alentour et les peuples lointains ? Si tu me déclares la plus « belle, et si tu m’adjuges la pomme, le plus magnifique trésor « de la terre fera ton bonheur : ce trésor est une femme excel« lente, la plus belle de toutes, vertueuse, noble et sage. Qui « pourrait la louer dignement’ !1 Donne-moi la pomme, tu pos« sédcras le trésor des trésors, l’épouse du roi grec, je veux dire « Hélène, la belle. » Et il lui donna la pomme et la déclara la plus belle des trois. Elle l’aida en récompense à ravir la reine admirable, l’épouse de Ménélas : elle devint la sienne dans Troie. On voyait cette histoire en relief au milieu du champ, et, alentour, des écussons, avec des inscriptions ingénieuses. Chacun n’avait qu’à lire et il était au fait de la fable. Écoutez maintenant ce que j’ai à vous dire du miroir, où la place du verre était occupée par un béryl d’un grand éclat et d’une grande beauté. Tout s’y reflétait, la chose se fût-elle passée à des lieues de distance, et de jour ou de nuit. Et si quelqu’un avait un défaut à la figure, quel qu’il fût, une tache dans l’œil, il n’avait qu’à se regarder dans le miroir : à l’instant même disparaissaient tous ses défauts, toutes ses difformités étrangères. Estce merveille que je sois affligé d’avoir perdu ce miroir ? On avait pris pour le cadre un bois précieux, qu’on appelle Setliim, bois compacte et brillant. Nul insecte ne l’attaque : aussi est-il, on le comprend, beaucoup plus estimé que l’or : la seule ébène en approche. Avec ce bois, un artiste excellent fabriqua un jour, sous le roi Krompardès,un cheval doué d’une merveilleuse puissance. Il ne fallait qu’une heure, une heure sans plus, au cavalier pour faire cent milles. Je ne saurais maintenant conter à fond la chose, car il ne se vit jamais pareil cheval, depuis que le monde existe. Le cadre, dans toute sa largeur, d’un pied et demi, était orné d’élégantes ciselures, et, sous chaque figure, l’explication était inscrite en lettres d’or. Je vous conterai les histoires en peu de mots. La première était celle du cheval jaloux. Il voulut disputer avec un cerf le prix de la course ; mais il se vit dépassé, et il en eut un violent dépit. Il courut s’adresser à un berger et lui dit : « Tu feras une bonne prise, si tu