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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome V.djvu/189

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toutes parts à retrouver les objets perdus ; vous ferez votre possible. Si vous avez besoin de mon secours, il vous est assuré.

— Je suis reconnaissant de cette faveur, dit Reineke. Ces paroles me réconfortent et me donnent de l’espérance. Punir le meurtre et le brigandage est votre droit suprême. La chose est encore obscure pour moi, mais elle s’éclaircira. Je m’en occuperai avec la plus grande diligence ; je voyagerai sans relâche, de jour et de nuit, et je questionnerai tout le monde. Si je découvre où se trouvent les trésors, sans pouvoir les recouvrer moi-même ; si je suis trop faible, j’invoquerai votre secours. Vous me l’accorderez, et certainement la chose réussira. Que je produise heureusement les trésors devant vous, ma peine sera enfin récompensée et ma Gdélité reconnue. »

Le roi entendit ces paroles avec plaisir, et donna en tout point son approbation à Reineke, qui avait si artistement arrangé ses mensonges. Tous les assistants le crurent aussi. Il pouvait de nouveau s’en aller et courir où bon lui semblerait et sans demander permission.

Alors Ysengrin ne put se contenir davantage, et il dit, en frémissant :

« Monseigneur, vous croyez donc encore le voleur qui vous a menti deux et trois fois ! Qui n’en serait pas étonné ? Ne voyezvous pas que le scélérat vous trompe, et nous offense tous ? 11 ne dit jamais la vérité, et il invente de frivoles mensonges. Mais je ne le laisse pas quitte si aisément. Il faut que je vous montre qu’il est un fourbe, un hypocrite. Je sais trois grands crimes qu’il a commis. Il n’échappera point, nous fallût-il combattre. On nous demande, il est vrai, des témoins : à quoi serviraient-ils ? S’ils étaient là, et s’ils parlaient et remplissaient l’audience de leurs témoignages, cela serait-il bon à quelque chose ? Il n’en ferait pas moins à sa fantaisie. Souvent on ne peut produire des témoins : le scélérat devrait-il pratiquer ses ruses après comme auparavant ? Qui donc ose parler ? Il joue a chacun quelque tour, et chacun craint le dommage. Vous et les vôtres, vous le sentirez aussi et tous ensemble. Aujourd’hui je prétends le tenir : qu’il ne branle ni ne recule, et qu’il plaide contre moi. Il n’a qu’i prendre garde à lui. »