Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome V.djvu/38

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que la blanche vieillesse pèse sur ma tête, et pourtant ma force est vive encore. Oh ! nous pouvons bien, nous autres, nous comparer à ceux qui, dans une heure solennelle, virent le Seigneur Dieu leur apparaître dans le buisson ardent, car il nous est aussi apparu dans les nuages et la flamme. »

Gomme le pasteur se disposait à poursuivre cet entretien, et témoignait le désir d’apprendre la destinée de cet homme et des siens, son compagnon lui chuchota vivement ces mots à l’oreille- :

« Continuez à discourir avec le juge, et mettez la conversation sur la jeune fille. Moi, je vais aller à sa recherche, et je reviendrai dès que je l’aurai trouvée. •

Le pasteur lui répondit par un signe de tête, et l’observateur se mit en quête le long des haies, des jardins et des granges.

CLIO.

L’époque.

Le pasteur ayant demandé au juge étranger ce que sa communauté avait sou (fort, depuis combien de temps elle était bannie de ses foyers, l’exilé répondit :

« Nos souffrances ne sont pas nouvelles ; nous avons bu l’amertume de’toutes ces années, avec d’autant plus d’horreur que nous avons vu détruite en même temps la plus belle espérance. Qui peut nier, en effet, que son cœur ne se soit épanoui, qu’il ne l’ait senti 1-altre plus librement dans sa poitrine, aux premières clartés iln nouveau soleil, lorsqu’on entendit parler du droit commun ù tous les hommes, de la liberté, qui exalte les âmes, et de la louable égalité ? Alors chacun espéra vivre de sa propre vie ; elle sembla se briser, la chaîne dans laquelle tant