Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome V.djvu/47

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Là-dessus tu souris, sage pasteur, et tu répondis : « Prenez place sans crainte, et confiez-moi votre corps aussi bien que votre urne : ces mains sont depuis longtemps habiles à tenir les rênes, et l’œil, exercé à prendre un contour avec adresse. Car, à Strasbourg, j’étais accoutumé à mener la voiture, quand j’accompagnais à la promenade le jeune baron. Chaque jour, sous ma conduite, franchissant la porte sonore, elle gagnait les chemins poudreux, jusqu’aux prairies et aux tilleuls lointains, à travers la foule du peuple, qui passe le jour à se promener. »

A demi rassuré, le voisin monta dans la voiture, et s’assit en homme prêt à sauter dehors prudemment, et les étalons coururent au logis, désireux de l’écurie. Un nuage de poussière s’éleva sous leurs pieds vigoureux ; le jeune homme resta longtemps encore immobile : il voyait monter la poussière, la poussière se dissiper, et restait là comme privé de sentiment.

ÉRATO.

Dorothée.

Comme le voyageur, qui, avant le coucher du soleil, a porté encore une fois sa vue sur l’astre prompt à disparaître, en voit flotter ensuite l’image dans le bois sombre et sur le flanc du rocher ; où qu’il porte ses regards, elle accourt, et brille et se balance avec des couleurs magnifiques : ainsi l’image charmante de l’étrangère passait doucement devant Hermann et semblait suivre le sentier dans les blés. Mais il s’éveilla de ce rêve surprenant, se dirigea lentement vers le village et fut de nouveau élonné, car la noble figure de la vierge admirable venait encore