Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VI.djvu/107

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il avait commencé la copie pour Mme Mélina. Il déchira la feuille avec dépit, et renvoya jusqu’à l’ordinaire suivant la répétition de ses aveux.

Chapitre VII

Notre société se trouvait de nouveau réunie, et Philine, qui observait, avec la plus vive attention, toute voiture et tout cavalier qui passait, s’écria vivement :

«  Notre pédant ! voici notre aimable pédant ! Mais qui peut-il avoir avec lui ? »

Elle appela et fit des signes par la fenêtre, et la voiture s’arrêta. Un pauvre diable, qu’à son habit gris brun, tout râpé, et à sa chaussure mal conditionnée, on aurait pris pour un de ces maîtres ès arts, qui moisissent dans les universités, descendit de la voiture, et produisit au jour, en ôtant son chapeau pour saluer Philine, une perruque mal poudrée, mais du reste fort crêpée, et Philine lui jeta cent baisers.

Si elle trouvait son bonheur à aimer une partie des hommes et à jouir de leur amour, elle ne goûtait pas moins vivement le plaisir, qu’elle se donnait aussi souvent que possible, de mystifier d’une façon légère ceux que, pour le moment, elle n’aimait pas.

Au milieu du vacarme avec lequel elle reçut ce vieil ami, on oubliait d’observer ses compagnons de voyage : cependant Wilhelm crut reconnaître les deux dames et un homme, déjà vieux, qui entrait avec elles. En effet il se découvrit bientôt qu’il les avait vus souvent tous trois, quelques années auparavant, parmi la troupe qui jouait dans sa ville natale. Les filles avaient grandi depuis lors, mais le père avait peu changé. Il jouait d’ordinaire les vieillards bourrus et bienveillants, dont le théâtre allemand