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GOETHE.–ANN.D’APPR. 94

la remettre à la surveillance et aux conseils ù une amie, qui jouissait comme grande maîtresse du palais, d’une haute considération. Je l’accompagnai dans ce nouveau séjour. Nous fûmes l’une et l’autre fort contentes de la réception que l’on nous fit, et je souriais quelquefois en secret du rôle que je jouais maintenant dans le monde comme jeune et pieuse chanoinesse. Quelques années plus tôt, cette position m’aurait fort éblouie, et m’aurait même peut-être tourné la tête mais alors je demeurai fort calme en présence de tout ce qui m’entourait. Je me laissais gravement coiffer pendant une couple d’heures ; je faisais ma toilette, sans y voir autre chose que l’obligation où j’étais, dans ma nouvelle situation, de revêtir cette livrée de gala. Dans les salons, où le monde affluait, je parlais à tous et à chacun, sans qu’une seule figure, un seul caractère, me laissàt une impression durable. Quand je rentrais chez moi, la fatigue corporelle était, le plus souvent, la seule sensation qui me restât de ces brillantes fêtes. Cependant ce grand nombre de personnes que je rencontrais cultiva ma raison ; et je trouvai le modèle de toutes les vertus d’une sage et noble conduite dans quelques femmes, particulièrement dans la grande maîtresse du palais, sous laquelle ma sœur avait le bonheur de se former. A mon retour dans ma famille, je m’aperçus que ce voyage avait altéré ma santé. J’avais .observé la plus grande retenue et la diète la plus sévère, mais je n’avais pas été, comme autrefois, libre de mesurer mon temps et mes forces. Les repas, la promenade, les heures du lever et du coucher, la toilette et les sorties, n’avaient pas dépendu, comme chez moi, de ma disposition et de ma volonté. Dans le tourbillon du monde, on ne peut faire halte sans être impoli, et tout ce qui était nécessaire, je le faisais volontiers, parce que j’y voyais un devoir, que j’en attendais la fin prochaine, et me sentais mieux portante que jamais. Néanmoins cette vie agitée, étrangère à mes habitudes, avait agi sur moi plus fortement que je ne l’avais cru car à peine étais-je arrivée à la maison et avais-je réjoui mes parents, en leur faisant un récit propre à les satisfaire, que je fus prise d’une hémorragie, qui, sans être dangereuse, et quoiqu’elle fût bientôt passée, me laissa longtemps une grande faiblesse.

C’était encore une leçon je la reçus avec joie. Rien ne m’at