Aller au contenu

Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VI.djvu/385

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

DH WILHELM MEISTRR. 381

vérités avec une imagination hardie et sublime, et ses détracteurs n’ont su ni démêler ni apprécier ses mérites.

H m’inspira une incroyable affection. Si j’eusse été maîtresse de mes actions, j’aurais certainement quitté amis et patrie pour me retirer auprès de lui nous nous serions entendus infailliblement, et il nous eût été difficile de nous accorder longtemps.

Grâce au ciel, j’étais alors étroitement enchaînée à la maison paternelle. C’était déjà un grand voyage pour moi que d’aller seulement au jardin. Les soins que je devais à mon vieux père infirme me donnaient assez d’occupation, et, dans mes heures de délassement, mon passe-temps était la sublime rêverie. La seule personne que je visse était Philon, que mon père aimait beaucoup, mais dont les rapports avec moi avaient un peu souffert de la dernière déclaration. Chez lui, l’émotion n’avait pas été profonde, et, après quelques vaines tentatives qu’il fit pour parler mon langage, il évita cette matière, d’autant plus aisément que ses connaissances étendues lui fournissaient toujours de nouveaux sujets d’entretien.

J’étais donc une sœur morave de ma façon, et je dus cacher surtout cette nouvelle direction de mon cœur et de mes sentiments au prédicateur de la cour, que j’avais grand sujet d’estimer comme mon confesseur’, et dont le grand mérite n’avait même souffert à mes yeux aucune atteinte de son extrême répugnance pour la communauté morave. Hélas ! je devais être, avec d’autres, pour cet homme respectable, la source de nombreux soucis.

Il avait fait, bien des années auparavant, la connaissance d’un honnête et pieux gentilhomme d’un pays voisin, et il avait dès lors entretenu avec lui une active correspondance, comme avec un fidèle qui cherche Dieu sérieusement. Quelle douleur pour le guide spirituel, lorsque ensuite le cavalier entra dans la communauté morave, et vécut longtemps parmi les frères ! Quelle joie, au contraire, quand son ami vint à se brouiller avec eux, et parut de nouveau s’abandonner entièrement à sa direction ! ]. On sait que les vieux luthériens, en ce point différents des nouveaux, admettent la confession.