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DE WILHELM MEISTER. 573

jugea nécessaire de faire les plus exactes recherches. Chacun s’efforçait de repousser les soupçons loin de soi ; il y eut parmi les gens de la maison des scènes violentes enfin notre homme vint nous avouer que c’était lui qui l’avait en sa possession. On lui demanda s’il en avait pris, il dit que non et il ajouta « Je <~ dois a la possession de cet. objet le retour de ma raison. Il dépend de vous de me reprendre ce flacon, mais vous me verrez retomber sans espoir dans mon premier état : Le sen« timent qu’il serait désirable pour moi de voir mes souffrances «terrestres terminées par la mort fut mon premier pas dans la voie de la guérison bientôt l’idée. me vint de les faire cesser K par une mort volontaire, et c’est dans ce dessein que j’enlevai te flacon ; le pouvoir de mettre tin, en un instant et pour jamais, à mes grandes douleurs m’a donné la force de les sup« porter, et, depuis que je possède ce talisman, le voisinage de K la mort m’a ramené vers la vie. Ne craignez pas que j’en fasse < : usage, mais décidez-vous, en hommes qui connaissez le cœu)’ « humain, à me faire aimer la vie en me laissant maître de la K quitter.Après de mûres réflexions, nous n’insistâmes pas davantage, et il porte maintenant sur lui, dans un solide petit flacon de cristal, ce poison, comme le plus singulier antidote. » On instruisit le médecin de tout ce qu’on avait découvert, et l’on résolut de garder avec Augustin le plus profond silence. L’abbé se proposa de lui tenir fidèle compagnie et de le faire avancer dans la bonne route où il venait d’entrer. Pendant ce temps, Wilhelm ferait avec le marquis le voyage d’Allemagne. Si l’on pouvait réveiller chez Augustin le désir de revoir sa pa" trie, on découvrirait à ses parents sa situation, et Wilheim le ramènerait dans sa famille.

Ses préparatifs de voyage étaient achevés, et, s’il parut d’abord étrange qu’Augustin témoignât de la joie en apprenant que son ancien ami, son bienfaiteur, allait sitôt s’éloigner, l’abbé ne tarda pas à découvrir la cause de ce singulier sentiment. Augustin ne pouvait surmonter l’ancienne peur qu’il avait de Félix, et il souhaitait de voir l’enfant s’éloigner le plus tôt possible. Tant de personnes étaient arrivées les unes après les autres, qu’on pouvait à peine les loger dans le château et les ailes, d’autant qu’on n’avait pas compté d’abord sur de si nombreuses