Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VII.djvu/25

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per plusieurs ouvriers et apprentis. Je demeurai donc près de mes parents, et continuai, en quelque façon, ma première vie, employant mes heures de récréation et mes jours de fête aux commissions charitables que ma mère continuait de me donner. »

La Visitation.

« Ainsi se passèrent quelques années, poursuivit Joseph. Je compris bientôt les avantages de mon métier, et mon corps, exercé par le travail, était en état d’entreprendre tout ce que la profession demandait. Je ne cessai pas cependant de remplir mon premier office envers ma bonne mère, ou plutôt envers les malades et les pauvres. Je parcourais les montagnes avec mon âne ; je distribuais ponctuellement sa charge, et j’achetais, en retour, chez les marchands et les trafiquants, ce qui nous manquait ici. Mon maître était content de moi, mes parents aussi. J’avais déjà le plaisir de voir, dans mes excursions, bien des maisons que j’avais aidé à construire, que j’avais décorées ; car ces dernières ciselures des poutres, ces sculptures de certaines formes simples, ces empreintes de figures d’ornement, cette enluminure de quelques enfoncements, qui donnent à une maison de bois un si riant aspect, tous ces ouvrages de goût, m’étaient particulièrement confiés, parce que je m’en tirais mieux que les autres, ayant toujours dans l’esprit le trône d’Hérode et ses sculptures.

« Parmi les personnes pauvres dont ma mère prenait un soin particulier, se trouvaient surtout les jeunes femmes enceintes, comme je pus le remarquer peu à peu, quoique les messages fussent, dans ces cas-là, traités avec mystère à mon égard. Je n’avais jamais alors de commission directe ; tout se faisait par l’entremise d’une bonne femme, qui demeurait non loin de chez nous, du côté de la vallée, et s’appelait Mme  Élisabeth. Ma mère, ayant elle-même des connaissances dans l’art qui sauve tant de vies dès leur entrée dans le monde, était incessamment d’intelligence avec Mme  Élisabeth, et j’entendais dire de tous côtés que maints robustes habitants de nos montagnes devaient la vie à ces deux femmes. Le mystère avec lequel Élisa-