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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VII.djvu/324

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qui l’avait secrètement occupé depuis quelques heures : « Cet homme, qui allait de tous côtés, réparant avec tant d’adresse les outils et les métiers, ne serait-il pas un membre fort utile de notre société ? » Lénardo réfléchissait à la chose, car les mérites de cet habile ouvrier avaient vivement frappé ses yeux. Il tourna donc la conversation de ce côté, et proposa au jeune homme, avec le ton du badinage, il est vrai, mais d’une manière d’autant plus ouverte, d’entrer dans une association importante et de prendre le parti d’émigrer outre-mer.

Le jeune homme s’excusa, assurant à son tour, d’un ton jovial, que les choses allaient bien pour lui dans le pays, qu’il attendait mieux encore ; il était né dans ces contrées, il y était accoutumé, connu de tous côtés, et partout amicalement reçu. En général, on trouverait dans ces vallécs peu de penchant pour l’émigration ; elle n’était nullement nécessaire, et la montagne avait pour ses habitants un invincible attrait.

« C’est pourquoi, dit le marchand, je m’étonne d’un bruit qui court que Mme Susanne va épouser son facteur, vendre ses propriétés et passer la mer avec son bel argent. »

Notre ami demanda qui était cette Susanne, et on lui apprit que c’était une jeune veuve, qui faisait, dans de favorables circonstances, un commerce avantageux des produits de la montagne, ce dont le voyageur pourrait s’assurer le lendemain par ses yeux, car, en suivant la route qu’ils avaient prise, ils arriveraient de bonne heure chez elle. *

« J’ai entendu diverses fois parler d’elle, dit Lénardo, comme d’une personne qui répand la vie et qui fait du bien dans ces vallées, et j’avais négligé de vous en demander davantage.

— Allons nous reposer, dit le marchand, afin de mettre à profit de bonne heure la journée de demain, qui promet d’être belle.»

Ici finissait le manuscrit, et Wilhelm, ayant demandé la suite, apprit qu’elle n’était pas alors dans les mains de ses amis. On l’avait envoyée à Macarie, dont l’esprit et la bienveillance devaient arranger certaines difficultés qui s’y trouvaient mentionnées, et démêler de graves complications. Wilhelm dut se résigner à cette interruption et se préparer à goûter, le soir, le plaisir d’une joyeuse conversation avec ses amis.