Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/228

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tourné de la sainte voie. Heureusement un marteau est sous sa main. Là se trouve un conglomérat digne de la plus grande attention. Son extrême dureté ne nous permet d’en détacher que de petites parcelles.

Avec des centaines de pèlerins, nous grimpons lentement le sentier le plus escarpé, qui court en zigzag sur les rochers ; on s’arrête et l’on badine souvent. C’était véritablement le tableau de Cébès, animé, vivant ; seulement on remarquait ici moins de sentiers détournés.

Arrivés au-dessus, nous trouvons autour de la chapelle la presse et le mouvement. Nous pénétrons dedans avec la foule. L’intérieur forme à peu près un carré parfait, sur trente pieds de côté ; le chœur, dans le fond, en a peut-être vingt. Là se trouve le maître autel, non pas moderne, mais dans le riche goût catholique. Il est très-élèvé et toute la chapelle a un aspect très-dégagé. Dans les angles les plus voisins du grand carré sont encore deux autels semblables, point endommagés et tout comme autrefois. Comment s’expliquer cela dans une église récemment dévastée ?

La foule s’avançait de la porte principale au maître autel, puis tournait à gauche, où elle témoignait une grande vénération pour des reliques enfermées dans un cercueil de verre. On touchait la caisse, on la frottait, on faisait le signe de la croix, et l’on s’arrêtait aussi longtemps qu’on pouvait ; mais l’un chassait l’autre, et je fus poussé dans le courant, puis hors de la chapelle par la porte latérale.

Des vieillards de Bingen s’approchent de nous pour saluer l’officier du duc de Nassau, notre honorable guide. Ils le proclament un bon et secourable voisin ; c’était lui, dirent-ils, qui les avait mis en état de célébrer décemment la fête de ce jour. Alors nous apprîmes qu’après qu’on eut aboli le couvent d’Eibingen, tous les objets nécessaires au culte, les autels, les chaises, l’orgue, les prie-Dieu et les confessionnaux, avaient été cédés pour un prix raisonnable à la commune de Bingen, afin de meubler la chapelle de saint Roch. Quand le côté protestant se fut montré si secourable, les bourgeois de Bingen.s’engagèrent à transporter eux-mêmes tous ces objets. On se rendit à Eibingen ; tout fut enlevé soigneusement ; une seule personne