Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/35

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un travail qui eût effrayé bien des jeunes gens à produire et à transporter dans nos climals ces fleurs étrangères.

En 1814, Goethe fit un voyage à Francfort. « Il y fut accueilli d’une manière triomphale. On donna le Tasse avec beaucoup d’appareil. Quand le poète parut dans sa loge, décorée de fleurs et de lauriers, l’orchestre exécuta une symphonie d’Haydn, puis toute l’assemblée se leva en poussant des cris de joie. Au lever du rideau, il se fit un silence solennel, et un prologue fut récité, dans lequel la ville souhaitait à son fils la bienvenue. Après la représentation, vint un épilogue, pendant lequel les couronnes qui paraient les bustes de Virgile et d’Arioste furent présentées à Goethe. Après la solennité, ses admirateurs remplirent les corridors et l’escalier, et il passa à travers la foule en exprimant sa reconnaissance. »

Suivons-le maintenant dans les dernières années de sa vie. Nous le verrons sans cesse occupé. Rien de ce qui se passe dans le monde des lettres, des arts et des sciences ne doit lui rester étranger. Il recherche, il attire à lui, les hommes éminents dans tous les genres. Il fréquente les bains de Garlsbad, et il y fait chaque année de nouvelles connaissances, de nouveaux progrès, dans l’étude des hommes et des choses.

En 1816, le duché de Weimar est érigé en grand-duché. CharlesAuguste établit l’ordre du Faucon, et il en décore son ami. Cette même année, Charlotte, la Charlotte de Werther, maintenant veuve, sexagénaire, mère de douze enfants, paraît k Weimar, et vient rendre visite à son poète. On a dit qu’elle l’embarrassa un peu en s’offrant à sa vue en robe blanche, comme pour rappeler un temps qui ne pouvait plus renaître, mais de bonnes autorités nous permettent de considérer ce détail comme une invention de quelque mauvais plaisant.

Cette année marqua pour Goethe plus sérieusement. Christiane mourut. On crut que c’était pour lui une délivrance ; on le jugeait mal, il regretta sincèrement la compagne de sa vie. Il avait eu pendant vingt-huit ans ses soins et son amour, et il ne put la perdre sans douleur. Des vers touchants, qu’il consacra à sa mémoire, en sont un témoignage. L’année suivante, son fils épousa Mlle Ottilie de Pogwisch, une des plus brillantes dames de Weimar. Elle fut tendrement chérie de son beau-père ; elle tint son ménage jusqu’à sa mort. Elle était si avant dans ses bonnes grâces, qu’elle pouvait tout se permettre avec lui. L’année d’après, il put chanter au berceau de son premier petit-fils (Walther) et il ne tarda pas à en voir naître un second (Wolfgang), qui semble avoir été son favori. Il le lais-