Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/36

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sait travailler et jouer dans sa chambre et l’appelait son petit loup (Wœlfchen).

Il était lui-même le vieil enfant gâté de la cour. Venait-il à se permettre dans son administration quelques actes un peu vifs et même irréguliers, l’intervention amicale du duc et de la duchesse arrangeait tout. L’essentiel était que Goethe fût tranquille et content. En 1823, les États de Weimar s’assemblèrent pour demander la reddition des comptes. Goethe, président de la commission des sciences et des arts, qui disposait d’environ 12000 thaler, laissa d^jp>rd, en ce qui le concernait, la demande % .- réponse, trouvant fort Mauvais qu’on lui demandât compte d’une si misérable somme. Enfin, il s’exécuta, et envoya son compte en deux lignes : reçu, tant ; dépensé, tant ; reste en caisse, tant. La lecture de cette pièce laconique provoqua les éclats de rire des uns et les murmures des autres. La grande-duchesse intervint.auprès des commissaires, et leur fit considérer que le vieux Goethe était un homme à part, qu’on lie l’aurait peut-être plus longtemps ; que vraisemblablement on ne retrouverait pas son pareil, en sorte que le danger du précédent était peu à redouter. Les comptes furent admis.

Plus les années s’accumulaient sur la tète de Goethe, plus il semblait redoubler d’activité. Ses Annales en rendent témoignage. Il s’occupait de tout : peinture, sculpture, architecture, géologie, météorologie, anatomie, optique, littérature orientale, littérature anglaise ; il suivait avec curiosité les romantiques français ; il lisait Caldéron, il relisait Homère. » La vie ressemble aux livres sibyllins, disait-il ; moins il en reste, plus elle est précieuse. Il allait peu dans le monde, très-rarement à la cour. C’était la cour qui venait chez lui. La grande-duchesse lui faisait visite une fois par semaine. Elle amenait parfois avec elle quelques grands personnages, des princes, des rois. Cbarles-Auguste venait aussi, mais à l’improviste. Un jour, Goethe avait chez lui un étudiant d’Iéna. Un vieux monsieur entre sans bruit et s’assied sur une chaise. L’étudiant, qui avait la parole, la garde et continue sans se déranger. Quand il eut fini : Il faut pourtant, Messieurs, dit le vieux poète, que je vous présente l’un à l’autre…. Son Altesse Royale, le grand-duc de Saxe-Weimar ; M. N.N. étudiant à léna. »

En 1821, parurent les Années de Voyage de Wilhelm Meister. Sans nous arrêter à l’examen critique de cet ouvrage, reconnaissons avec notre savant biographe que le vieil auteur prit cette fois avec le public de grandes libertés. Mais, s’il n’a pas fait un bon roman, un ouvrage achevé, il a laissé un précieux volume.