Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/394

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tion soignée et fut son premier maître. Ensuite le jeune homme fut envoyé à Kloster-Bergen, au bord de l’Elbe, où se trouvait un institut renommé, sous la direction du pieux abbé Steinmetz. De là il se rendit à l’université de Tubingue, puis il remplit quelque temps à Berne une place de précepteur ; mais il fut bientôt attiré à Zurich, auprès de Bodmer, qu’on pouvait appeler dans l’Allemagne du Sud l’accoucheur du génie, comme Gleim le fut plus tard dans l’Allemagne du Nord. Là il se livra sans réserve au plaisir que procure à la jeunesse la production spontanée, quand le talent se forme sous une direction bienveillante, sans que les hautes exigences de la critique soient mises sur le tapis. Mais l’élève fut bientôt trop grand pour le maître ; il revint dans sa ville natale, et fut dès lors son propre maître et son instituteur, .en développant sans relâche ses inclinations littéraires et poétiques. Les occupations mécaniques d’officier de la chancellerie lui prirent du temps, sans lui ôter le goût et Ie courage. Son génie aurait pu se flétrir dans une position si étroite ; mais il fit la connaissance d’un riche voisin, le comîe Stadion, ministre de l’électeur de Mayence. C’est dans cetle illustre et opulente maison qu’il respira pour la première fois l’air du monde et des cours ; les affaires d’Etat, intérieures et extérieures, ne lui restèrent pas étrangères, et il trouva dans le comte un protecteur pour toute sa vie. Par là, il ne resta pas inconnu au prince électeur, et lorsque, sous Emeric-Joseph, on songea à rendre une vie nouvelle à l’université d’Erfourt, on y appela notre ami : preuve évidente des sentiments de tolérance qui se répandaient depuis le commencement du siècle dans les différentes Églises chrétiennes et même chez tous les hommes.

Wieland ne put déployer longtemps à Erfourt son activité sans être connu de la duchesse régente de Weimar, et Charles de Dalberg, toujours si empressé à faire le bien, ne manqua pas de l’introduire auprès de la princesse. Cette mère, si tendre, si instruite elle-même, n’avait point de plus pressant souci que de faire donner aux princes ses fils une instruction suffisante. Wieland fut appelé, afin qu’il employât ses talents littéraires, ses qualités morales, pour le bien de la maison de nos princes, pour notre bien et celui de l’État.

Le repos qu’on lui avait promis après que l’éducation serait