Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/464

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Le Saint Jean de Marais est rendu tout à fait dans le sentiment de Vinci ; c’est un beau visage ovale ; les cheveux lisses descendent et se terminent en boucles allongées, infiniment gracieuses, surtout à l’endroit où elles caressent la main de Pierre, qui presse l’épaule de Jean. Ce qu’on voit de la prunelle se détourne de Pierre : observation pleine de finesse, car celui qui prête l’oreille avec un sentiment profond à son voisin, qui lui parle en secret, détourne de lui son regard. Dans Vespino, c’est un jeune homme satisfait, tranquille, presque endormi ; pas une trace de sentiment sympathique.

Passons à la gauche du Christ, et réservons pour la un ce que nous avons à dire sur la figure du Sauveur.

Saint Thomas. La tête et la main droite. L’index élevé est un peu courbé vers le front, pour exprimer la réflexion. Ce mouvement, qui convient si bien au soupçon et au doute, a été méconnu jusqu’à ce jour, et l’on a déclaré menaçant un disciple méditatif. Dans la copie de Vespino, il est également assez réfléchi ; mais, l’artiste ayant encore omis l’œil droit, qui fuit, il en résulte un profil perpendiculaire, uniforme, où il n’est rien resté de cette tête de l’ancienne copie, qui se pousse en avant et qui cherche.

Saint Jacques Le Majeur. Émotion violente ; la bouche trèsouverte, l’effroi dans l’œil ; tentative originale de Léonard. Mais nous avons lieu de croire que cette tête a été aussi fort bien rendue par Marcus. Le calque est excellent. Dans la copie de Vespino, tout est perdu, pose, attitude, expression, tout a disparu et s’est fondu dans je ne sais quelle indifférente vulgarité.

Saint Philippe. Infiniment aimable. Il ressemble parfaitement aux jeunes hommes de Raphaël, qui se groupent autour de Bramante, au côté gauche de l’École d’Athènes. Malheureusement Vespino a encore effacé l’œil droit, et, comme il ne pouvait nier qu’il n’y eût là plus qu’un profil, il a fait une tête équivoque, singulièrement penchée par-dessus.

Saint Matthieu. Nature jeune, confiante ; cheveux crépus ; air d’angoisse dans la bouche entrouverte ; les dents, visibles, expriment une sorte de légère fureur, qui s’accorde avec le mouvement passionné du visage. Il n’est rien resté de tout cela dans