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Page:Goethe - Œuvres d'Histoire naturelle, trad. Porchat (1837).djvu/217

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BOTANIQUE.

s’identifie à la masse des travailleurs qui s’avance toujours et vous emporte avec elle.

C’est ainsi que j’ai cédé, avec tous mes contemporains, au pouvoir entraînant et au génie vainqueur de Linnée. Je m’abandonnais à lui et à ses doctrines en toute sécurité ; cependant je sentais peu à peu que, sans m’égarer en suivant cette voie, je n’irais pas aussi loin que je le voulais.

Pour traduire avec vérité l’état dans lequel je me trouvais alors, je suis forcé de rappeler que, né poëte, j’ai toujours cherché à modeler mes expressions sur les choses pour arriver à les peindre. Au lieu de cela, il fallait maintenant apprendre par cœur une terminologie complète, avoir un certain nombre de substantifs et d’adjectifs tout prêts, pour les appliquer avec discernement à chaque nouvelle forme qui se présentait et la désigner d’une façon caractéristique. Un travail de ce genre m’a toujours fait l’effet d’une mosaïque où l’on place des pièces préparées d’avance les unes à côté des autres, afin que leur ensemble produise l’effet d’un tableau ; sous ce rapport, ce mode de travail me répugnait un peu.

Cependant je reconnaissais la nécessité de cette méthode, qui a l’avantage de désigner toutes les apparences extérieures des végétaux, par des mots généralement adoptés, et de rendre inutiles des dessins souvent infidèles et difficiles à acquérir. Mais l’extrême variabilité des organes me paraissait un obstacle insurmontable. Quand je voyais sur la même tige des feuilles d’abord entières, puis incisées, puis presque pennées, qui se simplifiaient, se contractaient de nouveau pour devenir des petites écailles et disparaître enfin tout-à-fait, alors je n’avais plus le courage de planter un jalon ou de tracer une ligne de démarcation quelconque.

Caractériser les genres avec certitude et leur subor-