Page:Goethe - Le Renard, 1861, trad. Grenier.djvu/109

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roi vous donnera force éloges ; il vous recevra avec honneur, vous serez trois fois le bienvenu. »

Le bélier crut tout cela. L’autre se dépêcha de rentrer, prit la besace, y fourra la tête de Lampe et pensa au moyen d’empêcher le pauvre Bellyn d’ouvrir la poche ; il lui dit en revenant : « Passez la besace autour de votre cou, mon neveu, et ne vous laissez pas entraîner par la curiosité à regarder ces lettres. Ce serait une curiosité dangereuse ; elles sont bien empaquetées ; laissez-les ainsi. N’ouvrez même pas la besace ! J’ai fait un nœud particulier, comme il est d’usage entre le roi et moi dans les affaires d’importance ; et, si le roi trouve le nœud convenu, vous mériterez des grâces et des présents en votre qualité de fidèle messager. Même quand vous aborderez le roi, si vous voulez vous mettre plus avant dans ses faveurs, vous lui ferez remarquer que vous avez conseillé ces lettres après mûre réflexion, que vous avez même aidé à les écrire ; cela vous rapportera profit et honneur. »

Bellyn fut ravi, se mit à gambader çà et là avec joie, et dit : « Reineke, mon neveu et mon maître, je vois maintenant combien vous m’aimez et voulez m’honorer ; je serai très-flatté d’apporter ainsi devant tous les seigneurs de la cour d’aussi bonnes pensées, des paroles aussi belles et aussi élégantes. Car, certes, je ne sais pas écrire aussi bien que vous ; mais ils seront obligés de le penser, et c’est à vous que je le devrai. C’est pour mon plus grand bonheur que je vous ai suivi jusqu’ici. Dites-moi, maintenant, n’avez-vous plus rien à me commander ? Lampe ne part-il pas d’ici en même temps que moi ?

—Non, comprenez bien, dit le rusé Reineke, cela n’est pas possible. Allez toujours en avant tout doucement, il vous suivra aussitôt que je lui aurai confié certaines affaires assez graves ! —Dieu soit avec vous, dit Bellyn, je vais donc partir. »