Page:Gogol - Nouvelles choisies Hachette - Viardot, 1853.djvu/144

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

chose de ce genre. Mais la réunion la plus complète se faisait à l’heure du souper, auquel assistaient le tabountchik, qui avait eu le temps de ramener ses chevaux de la steppe, et le berger, qui avait enfermé ses vaches dans l’étable, et tous ceux qu’on ne pouvait voir dans le cours de la journée. Pendant le souper, les langues les plus paresseuses se mettaient en train ; on parlait de tout, et de ce que l’un s’était fait des pantalons neufs, et de ce que l’autre avait vu un loup, et de ce qui se trouve au centre de la terre. Il se rencontrait toujours dans la compagnie quelque diseur de bons mots, espèce assez fréquente parmi les Petits-Russiens.

Le philosophe se mit en rond avec les autres devant le seuil de la cuisine. Bientôt une paysanne en bonnet rouge sortit de la porte, tenant dans ses mains un grand pot tout fumant de golouchkis, qu’elle mit au milieu du cercle, et chacun tira de sa poche une cuiller ou un poinçon de bois. Dès que les mâchoires commencèrent à se mouvoir avec moins de rapidité, et que l’appétit dévorant de tous ces messieurs se fut un peu assouvi, beaucoup d’entre eux se mirent à parler. La morte était naturellement l’objet de toutes leurs conversations.

— Est-il bien vrai, dit un jeune berger qui portait, attachés à son baudrier de cuir, tant de bou-