Page:Goldoni - Les chefs d'oeuvres dramatiques, trad du Rivier, Tome I, 1801.djvu/13

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Discours

réforme : Goldoni en eut la gloire. Il s’annonça, en 1742, par la brave Femme, comédie d’intrigue à la fois et de caractère, qui réussit complètement, et acheva d’ouvrir les yeux sur les vices révoltans des pièces précédentes. Dès-lors, on commença à entrevoir l’idée et la possibilité d’une réforme ; les bons esprits en embrassèrent avidement l’espérance on applaudit, on encouragea l’auteur, et l’on cria sans doute alors au Molière de l’Italie : courage, Goldoni ! voilà la bonne comédie !

C’était peu de purger le théâtre des platitudes grossières qui le défiguraient : les vues de Goldoni s’étendaient plus loin. Il voulait ramener la comédie à ses vrais principes, à son premier objet. Mais c’est la que l’attendaient des difficultés presqu’insurmontables : c’est là qu’il eut à lutter contre le préjugé qui ne concevait pas que la comédie italienne pût exister sans Masques. Cette bigarrure monstrueuse dans les traits du visage, dans le costume et dans l’idiôme, révoltait avec raison Goldoni : c’était un reste de barbarie qu’il eût voulut faire disparaître totalement, et auquel cependant il fut obligé de se soumettre lui-même, pour faire goûter ses chef-d’œuvres au parterre italien. C’est ainsi, (afin qu’il y eût un trait de ressemblance de plus entre ces deux grands hommes) que l’illustre auteur du Tartuffe composait la farce du Médecin malgré lui, pour ramener le public au Misanthrope. Tout en accueillant avec transport des productions si nouvelles pour eux, les Italiens voyaient à regret que la réforme projetée et déjà ébauchée, tendait évidemment à la sup-