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Préliminaire.

l’Angleterre, le Portugal, s’étaient souvent adressés à lui, pour enrichir leurs théâtres de ses productions, et plusieurs cours disputaient à l’Italie l’avantage de le posséder. La France se mit sur les rangs et obtint sa préférence. La perspective agréable du séjour de Paris, le désir de voir de près et d’étudier à loisir le premier peuple de l’Europe, la gloire de travailler pour une nation à laquelle ses chef-d’œuvres dramatiques ont acquis le droit d’être plus difficile qu’une autre, l’ambition et l’espérance de s’en voir applaudi tout détermina le choix de Goldoni, et il arriva à Paris en 1761. Mais il ne tarda pas à s’apercevoir qu’il avait trop aisément cédé à sa première impulsion, et que l’on juge tout autrement, en l’examinant de près, ce qui nous avait séduit de loin. Des mœurs nouvelles à étudier et à peindre, le genre de nos spectacles et le caractère de nos spectateurs bien difFérens de ceux de l’Italie, la supériorité désespérante de nos pièces et de nos acteurs, tout inspira à Goldoni une trop modeste défiance de ses talens, et il fut assez grand, pour avouer ses craintes : il n’y a que la médiocrité que rien n’effraie. Cependant il avait contracté un engagement ; il Voulut le remplir ; et l’amour propre même d’auteur ne put l’emporter, chez lui, sur la seule idée de manquer à sa parole. Il travailla : mais, découragé d’avance, et ne se flattant d’aucun succès, il donna au théâtre italien, dans le cours de deux ans, une vingtaine de pièces qui ne justifièrent, aux yeux des Français, ni ses talens ni sa renommée.

Arrivé au terme désiré de son engagement, Goldoni